Hommage à Jean Recher
"Là bas près des grands bancs, Il est un coin de France !
Oh, ce n'est pas très grand, ,quelques rochers, une anse
Au point Sud Galantry, au nord le Colombier.
Des maisons de pêcheurs, un slip, un atelier.
Un immense frigo, l'hôpital, une église,
Et quelques restaurants. Cette terre promise,
Paradis du marin, lieu de prédilection,
Où l'on boit du whisky en guise de potion,
Enfant de Tahiti ou fille de Cythère,
Cette île enchanteresse, eh bien oui, c'est Saint-Pierre."
Ce petit poème, fut composé par Jean RECHER, à bord de son chalutier "La Jeune Française", il y a juste 34 ans, avant d'accoster, en avril 1971 à Saint-Pierre. Ce n'était pas, loin de là, sa première escale dans l'archipel, qu'il découvrit comme mousse du "Saint Martin Legasse" en 1938. Mais elle fut marquée solennellement avec la remise par le Maire - Joseph LE HUENEN - du diplôme de Citoyen d'Honneur de la ville, à ce grand capitaine de pêche.
Ces quelques vers montrent bien l'attachement de son auteur pour l'archipel où, durant les dures campagnes de pêche d'hiver et de printemps, il n'hésitait jamais à donner à son équipage quelques heures de détente au "paradis" ! Excellent pêcheur, respecté par ses pairs, aimé de ses hommes, "Jeannot" , au cours de ces escales, était pour ceux qui le rencontraient, un interlocuteur passionnant. Parlant du "grand métier " et de son avenir avec compétence et lucidité, il fut un conseiller avisé pour le délégué de l'archipel aux négociations franco canadiennes de mai 1971.
Mais c'était aussi un joyeux convive, dont le répertoire d'histoires et d'anecdotes était très riche. Il aimait composer ces poèmes qui illustraient avec humour et tendresse, le métier et les escales.
Tout naturellement il raconta avec talent ses trente neuf ans sur les bancs de Terre-Neuve, dans un livre : " Le Grand Métier " qui connut un réel succès, heureux de contribuer à la mémoire d'une grande pêche qui disparaissait. "Ce n'est pas moi qui ai mis sac à terre, aimait-il à dire, c'est le métier qui m'a quitté".
Au musée des Terre-Neuvas de Fécamp, comme à la Société des Œuvres de Mer où il était administrateur, il faisait revivre ce grand métier, avec toujours le rappel, empreint de nostalgie, des escales à Saint-Pierre, car il était fier de son titre de citoyen d'honneur . Il n'hésita pas un seul instant pour co-signer avec nous, il y a dix ans une lettre au Ministre de la Défense. Nous réclamions la présence permanente d'un navire de la Marine Nationale à Saint-Pierre, pour la surveillance des eaux que le malheureux arbitrage international laissait à l'archipel.
Adieu Jeannot, tous tes amis à Saint-Pierre, comme à Fécamp ou Saint-Malo garderont vivant ton souvenir, espérant qu'un jour, une rue de Saint-Pierre rappellera aux passants le souvenir d'un grand capitaine de pêche, qui fut, certainement, parmi les chalutiers métropolitains, le champion du nombre d'escales dans un port où il se sentait chez lui !
Alain COUDRAY (ancien administrateur) et Lionel MARTIN
Citoyens d'Honneur de Saint-Pierre